mercredi 14 février 2018

Pauline, Jessica, Chloé et les hommes mariés (5)

Dessin de Mike

http://placardemike.blogspot.com

– Vous savez ce que je me demande, les filles ?
– Quoi donc, Pauline ?
– Le premier type, là, celui dont je m’étais occupée…
– Luc.
– Luc, oui.
– Eh ben, si ça tombe, ça l’a pas découragé notre petite leçon de l’autre jour. Il s’est déjà remis en chasse.
– Oh, tu crois ?
– Comme je l’ai perçu, c’est le mec complètement accro. Qui peut pas se passer de multiplier les conquêtes.
– Il y est plus pourtant son pseudo sur le site.
– Ça, évidemment ! Il est pas idiot. Il a dû s’en recréer un autre. Et dès le lendemain, si ça tombe. Je vais étudier ça de près.

Le soir même, elle déboulait triomphalement chez moi en compagnie de Jessica.
– Bingo ! C’est Vatilord son pseudo.
– T’es sûre ?
– Certaine. Il fait toujours systématiquement les mêmes fautes d’orthographe.
– Ah ! Et alors ?
– Et ben alors, j’ai bien envie de pas le lâcher. Je vais me créer un autre profil et je vais le brancher. Le connaissant, il va donner tête baissée dans le panneau. Et finir par me proposer une rencontre.
– J’imagine sa tête quand il va voir que c’est toi.
– Ah, ça, il sera dans ses petits souliers. Et il y aura pas de grands discours. Pas de discours du tout, même. Je vous l’amène aussi sec. Pieds et poings liés. Et en place pour le quadrille.

Ça n’a pas été aussi vite qu’elle l’imaginait.
– Il écrit. Beaucoup. Il téléphone. Quasiment tous les jours. Mais il parle pas de rencontre. Alors ou il est surbooké, il a tout un tas de nanas dans tous les coins ou bien alors il se méfie.
– Peut-être qu’il a reconnu ta voix ?
– Ça m’étonnerait. Elle est pas spécialement reconnaissable, ma voix, et puis il doit en entendre tellement que dans le tas…
Mais ça a quand même fini par arriver.
– Ça y est ! C’est mûr. Je vous attends, les filles, toutes affaires cessantes.

Elle l’avait fait mettre à genoux, sur une chaise, tout nu, les mains sur la tête.
– Eh ben, dis bonjour, toi ! Qu’est-ce t’attends ? Tu reconnais pas Jessica et Chloé  ?
– Bonjour.
En gardant les yeux obstinément fixés par terre.
– Ah, non, mais mieux que ça ! On regarde les gens quand on les salue. C’est la moindre des politesses. Allez, recommence !
– Bonjour, Jessica ! Bonjour, Chloé !
En nous lançant à chacune, à tour de rôle, un bref regard, lourd de confusion.
– C’est mieux. C’est pas encore ça, mais c’est mieux. Oui, alors vous voyez, les filles, il y a un petit bonus aujourd’hui. Parce qu’il se fiche vraiment du monde. Nous, on s’est démenées, tant qu’on a pu, on a payé de notre personne, pour lui faire comprendre que son comportement était inadmissible, qu’il avait tout intérêt à changer son fusil d’épaule. Résultat des courses : ça n’y a strictement rien fait. Il en prend toujours autant à son aise. C’est pour ça : si on veut y arriver, il faut passer maintenant à la vitesse supérieure. Mais asseyez-vous ! Restez pas plantées là. Il va y en avoir pour un moment. Asseyez-vous ! La banquette vous tend les bras. Avec vue sur son attirail qui, soit dit en passant, ne casse pas trois pattes à un canard. Mais on peut le faire se retourner, si vous préférez.
– Tout-à-l’heure… On a tout notre temps.
– Oui, t’as raison, Chloé, tout-à-l’heure. Quand on lui tirera sur le cul un de ces feux d’artifice de derrière les fagots dont il nous dira des nouvelles. En attendant, vous savez que j’étais vraiment à deux doigts d’appeler sa femme. Parce qu’à force de pousser le bouchon… Mais il m’a suppliée : tout ce que je voudrais il accepterait. Absolument tout. Mais pas sa femme ! Pas sa femme ! Et voilà le résultat ! Oh, mais je l’ai bien prévenu. C’est la dernière fois. Le prochain coup, il n’y coupe pas. Je mets Séverine au courant. T’as bien compris, toi ?
Il a fait signe que oui. À grands hochements de tête précipités. Oui.
– Bon… Et maintenant on va faire un jeu. On a mené une petite enquête sur toi et on a appris des tas de choses.. C’est qu’il y en a des nanas après qui tu cours, dis donc ! Et pas qu’un peu ! Alors tu sais pas ? Tu vas nous en dresser la liste. Et tâche de n’oublier personne sinon… sinon ton sursis saute. Allez, on t’écoute !
– Valérie.
– Et un coup de martinet pour Valérie.
– Aïe !
– Après ?
– Lucile.
– Et un coup pour Lucile.
– Barbara.
– Et pour Barbara. C’est tout ?
Il a paru hésiter.
– Oui.
– Menteur !
Une dizaine de coups. En rafale. Précipités. Lancés avec vigueur.
– Aïe ! Aïe ! Aïe !
– C’est ça, piaule, mais réponds !
– Laetitia… Axelle…
– Il y en a trop. On va te faire un prix de gros. Mais avant…
Elle l’a fait descendre, a tourné la chaise.
– Là, côté cul, maintenant, les filles ! Enjoy !
Et elle s’est déchaînée. À grands coups de martinet. Sur les fesses, les cuisses, le dos. Cramponné au dossier de la chaise, il criait comme un perdu.
Jessica m’a poussée du coude.
– Regarde-la !
– Oui. Elle prend son pied, c’est clair.

Ce que, dès qu’il a été parti, elle a volontiers reconnu.
– J’étais à deux doigts de jouir, mais alors là vraiment à deux doigts.
– Peut-être la prochaine fois… S’il y en a une.
– Comment ça ?
– Ben, tu lui as dit qu’il y en aurait pas. Que, s’il recommençait, tu prévenais aussi sec sa femme. Et il recommencera. Il pourra pas s’empêcher. Tu vas le faire ?
– Oh, ben non, non. Ce serait dégueulasse. Et puis…
– Et puis il te manquerait ce type.
– Un peu.
– Et donc ?
– Le mieux, ce serait un abonnement. Il viendrait chercher sa petite correction, à date fixe, et, en échange, je lui garderais le secret.
– Et il pourrait faire tout ce qu’il veut.
– Oui, oh, ben alors là, pas question. Je garderai un œil attentif dessus.

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